Histoire

Brève Histoire

Le 28 septembre 1914, l’avance des Allemands est stoppée par les troupes françaises à la Boisselle. De durs combats ont eu lieu pour la possession du cimetière civil, et pour des bâtiments de ferme situés à la bordure sud-ouest du village, connus des Allemands sous le nom de Granathof ou « ferme de l’obus », ou pour les français comme l’ « Ilot ».

Une carte postale allemande quelque peu macabre montrant les combats désespérés contre les troupes françaises pendant la capture de la Boisselle par le 120ème RIR en septembre 1914. L’image appartient à Jon Haslock et est reproduite avec sa permission.

Dans ses efforts pour reprendre l’Ilot, en décembre 1914, le génie français commença à creuser des tunnels sous les ruines, point de départ d’une lutte prolongée sous la surface du sol, qui allait s’étendre et devenir plus profonde de jour en jour jusqu’en juillet 1916. Avec la guerre arrêtée en surface, chaque côté continua à explorer sous les tranchées adverses et à faire exploser des charges de plus en plus importantes, tout en protégeant ses propres lignes par la guerre souterraine. Quand les britanniques prirent position dans la somme en août 1915, les français et les allemands travaillaient à une profondeur de 12 mètres. Le poids de leurs charges avait atteint 3000 kg. Le No man’s land était déjà une ligne presque continue de cratères sur 375 mètres.

Photographie aérienne des Glory Hole en août 1915. (Avec l’autorisation du Royal Engineers Museum & Library)

Les compagnies de tunneliers britanniques employèrent des mineurs professionnels pour étendre et approfondir le système, d’abord à 24 mètres et finalement à 30 m. Le poids des charges a aussi été augmenté, jusqu’à plus de 6000 kg. Aujourd’hui, les corps de nombreux mineurs reposent toujours sous le champ de cratères. En surface, l’infanterie occupait les tranchées distantes de 45m maximum, et vivait constamment avec le danger des snipers, des bombes de mortier et des grenades au dessus, et des mines ennemies en dessous. En conséquence des hostilités réciproques constantes, la maintenance des tranchées avancées de chaque côté du No man’s land était difficile et dangereuse. Pour les soldats français, allemands et britanniques, la Boisselle était un des secteurs les plus célèbres du front de l’ouest.

Tunneliers de la 179ème Compagnie, en 1916 à Albert. (Avec l’autorisation de Mrs G. Hillman)

La bataille de la Somme

Au début de la bataille de la Somme, la Boisselle se trouvait sur l’axe principal de l’attaque britannique. Les allemands avaient solidement fortifié les caves des maisons en ruine, alors que le sol profondément creusé des Glory Hole rendait toute attaque directe sur le village impossible. Pour soutenir l’attaque, les britanniques ont donc placé deux mines massives, appelées Sape Y et Lochnagar, sur chaque flanc. Malgré leur taille colossale, les mines n’ont pas pu aider à neutraliser suffisamment les défenses allemandes à la Boisselle. Quand la 34ème division a attaqué, elle a subi les plus lourdes pertes pour une unité le 1erjuillet, lui-même resté le jour le plus sanglant de l’histoire de l‘armée britannique. Après d’autres assauts coûteux, les ruines de la Boisselle furent finalement capturées le 4 juillet. Les combats revinrent dans le Somme en mars 1918, quand les Allemands reprirent le village, pour être repoussés en Août.

Soldats allemands du 111ème Régiment d’Infanterie de Réserve sur la position du Granathof. Les bords rejetés du cratère sont visibles derrière eux dans le No man’s land, marqués « Tr ». (Avec l’autorisation de Ralph J. Whitehead)

Après-guerre

Impropre à la culture après la guerre, la zone des Glory Hole a été peu à peu achetée par la famille Lejeune. Dans les années 20, ils rebouchèrent les tranchées mais laissèrent le champ de cratères intact. Depuis, le terrain n’a été utilisé que comme verger ou comme pâture. Dans les années 30, une proposition a été faite pour acquérir et transformer une partie du site en mémorial à la 34ème divsion. En 1936, lors d’une cérémonie particulière pour commémorer le passage du secteur des Français aux troupes écossaises en juillet et août 1915, le sol des Glory Hole a été mélangé à la terre des zones de recrutement des Bretons du  19èmerégiment d’infanterie (Brest) et des Black Watch (Aberfeldy dans le Perthshire) : le profond lien celte forgé 20 ans auparavant était toujours très fort. Deux urnes ont été faites spécialement pour cet échange symbolique. Le logo du Groupe d’Etude de la Boisselle est inspiré de l’urne qui existe toujours au Musée Black Watch de Perth.

La zone des Glory Hole après la guerre avec la Sape Y en arrière plan.

Alors que de plus en plus de territoires étaient réquisitionnés pour la culture ou la construction de maisons, les zones de champ de batailles encore vierges, contenant à la fois les tranchées ennemies et les traces dramatiques de guerre des mines, se sont faites extrêmement rares sur le front occidental. C’est cette situation, mêlée d’une profonde affinité pour les Glory Hole qui s’est développée au fil du temps avec la visite annuelle des vétérans, qui a amené les propriétaires à demander l’aide du Groupe d’Étude de la Boisselle pour étudier et préserver le secteur.

Les Glory Hole en Mars 1916

Un officier du 1erDorset décrit les Glory Hole en mars 1916

A Millencourt, j’ai appris quelque chose sur la réputation des tranchées de la Boisselle. Elles faisaient partie des plus célèbres des lignes britanniques. Sur une distance considérable, les lignes ennemies étaient séparées seulement par la largeur des cratères de mine : les postes britanniques se trouvaient sur les lèvres des cratères, protégés par une fine couche de sacs de sable, et à distance de bombardement des postes allemands. L’accès aux postes était étroit, et les tranchées remplies d’eau bien en dessous du niveau des lignes allemandes, et par conséquent toujours sous le regard et le tir précis des snipers. Des obus de mortiers les plus lourds explosaient jour et nuit sur ces accès dans un bruit assourdissant. Les tranchées de communication étaient en fait pires que les postes dans les cratères de mine pour la plupart des gens. Mais certains, cependant, n’aimaient pas  rester assis des heures à ne rien faire en haut des mines qui pouvaient exploser à tout moment. Dans les cratères, tout mouvement en plein jour était déconseillé. Les quatre commandants de compagnie et le colonel montèrent pour examiner les tranchées et en firent un rapport défavorable. Le colonel déclara que, dans sa longue expérience, ces tranchées étaient les pires qu’il ait vues. Dans l’après-midi, un camarade et moi avons avancé pour inspecter les cratères de mine, que ma compagnie devait prendre pendant la nuit. Nous avons passé la tranchée de notre ligne de front vers les ruines du cimetière que notre ligne traversait. A l’est du cimetière se trouvaient les tas de craie blanche de plusieurs cratères de mine. Au dessus s’étendaient les souches d’arbres et les restes de brique de ce qui avait été le village de la Boisselle. Nous avons progressé lentement dans les vestiges d’une tranchée et sommes arrivés aux cratères, et aux sapes qui les reliaient. Ici, il n’y avait pas de tranchée, seulement des sacs de sable, une large épaisseur, à peu près 60 cm au dessus de la boue omniprésente. La posture correcte à adopter dans de telles circonstances était difficile à déterminer. Nous, en tout cas, nous sommes trompés dans notre jugement, puisque nous avons attiré l’attention malvenue d’un sniper, dont les tirs bien ajustés et expérimentés n’eurent aucun mal à traverser les sacs de sable. Nous sommes repartis en rampant et sommes arrivés juste à temps dans une tranchée derrière le cimetière, appelée Gowrie Street. Une boue liquide baignait nos genoux ; des troncs d’arbres déchiquetés aux formes étranges gisaient au dessus et le long de la tranchée. Le jour glacé mettait de la grisaille partout. Les croix brisées du cimetière gisaient en tout sens près des tombes éventrées, alors qu’une croix, toujours debout comme par miracle, regardait vers les cratères et les ruines de la Boisselle. Les tranchées étaient vivantes d’hommes, mais aucun signe de vie ne dépassait la surface du sol. Même l’herbe s’était flétrie sous les fumées des explosifs. La mort en effet régnait partout.

Charles Douie, The Weary Road, John Murray, London,1929

Tunnelier – le monde souterrain

Le capitaine Stanley Bullock de la 179ecompagnie de tunneliers décrit les conditions en sous-sol

A un endroit en particulier, nos hommes jurèrent qu’ils pensaient qu’il allait arriver, alors nous avons arrêté d’avancer et commencé la chambre en double équipe. Nous ne pensions pas pouvoir terminer avant qu’il nous fasse sauter, mais nous l’avons fait. Une chambre de 3,6 x 1,8 x 1,8 mètres en 24 heures. Les allemands firent travailler une équipe de plus que nous puis s’arrêtèrent. Ils savaient que nous avions fait une chambre et ils avaient peur que nous la fassions exploser, et le travail s’arrêta à cet endroit. Je détestais aller écouter dans cette chambre plus que dans n’importe quel autre endroit de la mine. Une demi-heure, parfois une, parfois trois fois par jour, dans un silence absolu avec le géophone sur les oreilles, à se demander si le son que vous entendiez était celui des Boches qui travaillaient en silence ou celui de vos propres battements de cœur. Dieu seul sait comment nous gardions notre calme et notre jugement. Après l’attaque de la Somme, quand nous avons étudié les mines allemands et que nous les avons raccordées à notre système, avec le théodolite nous avons découvert que nous étions séparés de 1,50m, et qu’il avait seulement commencé cette chambre puis s’était arrêté.